Les systèmes complexes sont définis, selon les cas et selon les auteurs, par leur structure, par l'existence d'interactions non-linéaires, par l'émergence de niveaux d'organisation différents, ou par leurs comportements collectifs non triviaux (multistationnarité, chaos, bifurcations, auto-organisation, émergence, boucles de rétroaction). Certains, partant du grand nombre d'entités, insistent sur la structure, l'hétérogénéité et la présence de niveaux d'organisation, aux propriétés émergentes. D'autres insistent au contraire sur la non-linéarité et la dynamique. Cette multiplicité des définitions a des causes objectives liées à l'hétérogénéité des objets regroupés sous le terme de systèmes complexes, qui vont de système naturels, (des molécules aux sociétés humaines), jusqu'aux systèmes artificiels comme le web. Cela correspond obligatoirement à une multiplicité de points de vue, qui se recoupent tous partiellement, bien sûr, mais où l'accent n'est pas mis sur les mêmes propriétés. que Ces différences sont aussi liées à des critères idéologiques ou philosophiques, particulièrement importants dans ces domaines.(voir aussi Matérialisme et idéalisme dans les sciences du complexe)
Ce qui nous importe ici c'est que, en dépit de leur très grande hétérogénéité et du très grand nombre de domaines où l'on peut en trouver, ces systèmes partagent certaines propriétés, et des méthodes d'études leur sont communes. Ces méthodes constituent le cœur de ce que l'on a appelé les sciences des systèmes complexes. Il s'agit d'une part d'appliquer les méthodes déjà existantes à des systèmes nouveaux et d'autre part à développer les nouvelles méthodes que l'hétérogénéité même et la variété de ces systèmes nécessitent. Le Réseau National des Systèmes Complexes (RNSC), qui s'est donné pour but de rassembler les scientifiques de tous horizons désireux d'utiliser les concepts et de partager les méthodes des sciences des systèmes complexes écrit :
Parce que les systèmes complexes nécessitent d'être analysés selon de nombreuses échelles spatiales et temporelles, les scientifiques affrontent des enjeux radicalement nouveaux, lorsqu'ils tentent d'observer des systèmes complexes, qu'ils apprennent à les décrire efficacement et à développer des théories originales de leur comportement et de leurs régulations. (1)
C'est pourquoi les sciences des systèmes complexes n'en sont encore qu'à leurs débuts et justifieraient un gros effort de recherches, théoriques et expérimentales, où l'interdisciplinarité jouerait un rôle important, ne serait-ce qu'entre mathématiciens et/ou informaticiens et spécialistes de tous les autres domaines où existent des systèmes complexes. Comme nous le verrons, c'est encore loin d'être le cas.
Les méthodes de simulation informatique (et il s'en est développé de plus en plus, soit pour simuler des systèmes réels, soit pour étudier les propriétés complexes), ont donc permis de retrouver toutes les propriétés mises en évidence par les systèmes dynamiques non-linéaires. Mais elles ont aussi permis de travailler sur des systèmes complexes beaucoup plus compliqués que ceux qui peuvent être modélisés par les systèmes dynamiques non-linéaires, tant par le nombre de variables que par leur hétérogénéité, et par là même elles ont rendu possible une confusion entre complexe et compliqué, que nous retrouverons souvent par la suite et qui obscurcit considérablement la question de la complexité.