Des questions sociétales majeures, sont apparues sur le devant de la scène au tournant du XXIe siècle, les questions du développement durable et de l'environnement, du climat, de la biodiversité, ont rejoint celles de la faim, de l'eau, de la démocratie… Elles s'imposent de plus en plus, en contradiction frontale avec le capitalisme, en dépit (et parfois à cause, comme dans le cas des agrocarburants) des tentatives de celui-ci de les récupérer sous le vocable de capitalisme vert. Ainsi, si le réchauffement climatique et l'énergie font partie des priorités de la recherche financée par l'Union européenne dans le prochain programme cadre de recherche et innovations dit Horizon 2020, cela s'inscrit dans une vision que la formulation suivante éclaire crûment :
Voir recherche scientifique,
recherche appliquée, fondamentale, finalisée dans le wiki du complexe
tout le long de la chaîne de l'innovation débouchant uniquement (1) sur l'apport au marché de produits et de services innovants. (2)
(1) C'est moi qui souligne.
(2) Présentation du Programme cadre (Horizon 2020) pour la recherche et l'innovation. Site de l'Union européenne.
C'est ainsi par exemple, que l'utilisation de ressources agricoles pour produire des biocarburants destinés à limiter l'effet de serre a conduit à une crise alimentaire très grave (3.) Cela illustre les limites atteintes par le capitalisme pour résoudre des questions vitales (4). La plupart du temps, les dégâts provoqués par le capitalisme vert proviennent du fait que, pour réaliser des profits, il voit uniquement un des aspects de la question.
Pourtant ce qui caractérise ces questions, c'est leur globalité, leur caractère transnational et interdisciplinaire et le fait qu'elles impliquent toujours des transformations et des interactions multiples (5). Les céréales, utilisées pour les biocarburants servent aussi à autre chose, la biodiversité ne génère pas de profit (6) et pendant que les uns s'assurent de gros profits en vendant très cher à EDF l'électricité fournie par les éoliennes, les autres (ou peut être les mêmes ?) ravagent des territoires entiers en extrayant le bitume ou le gaz de schistes. Ce sont, presque par définition, des questions complexes, qui mériteraient, vu les conséquences mondiales dramatiques qui peuvent découler du fait de les négliger, qu'elles impulsent un très gros effort de développement des sciences du complexe, y compris, voire surtout, aux niveau des recherches fondamentales. L'exemple de l'appel d'offres de l'ANR est de ce fait emblématique. Il ne néglige pas totalement ces questions mais elles ne représentent qu'une faible partie des crédits alloués à la recherche finalisée et, comme nous l'avons vu, elles ne mettent que très peu à contribution les sciences du complexe, surtout pas dans leur aspect dynamique (non-linéaire).
(3) Qui, en détournant des ressources alimentaires vers des carburants ont permis une spéculation sur le blé entraînant des famines).
(4) Il n'est pas question ici de développer ce point, qui a été abordé dans de nombreux ouvrages, par exemple Hervé KEH00 : Hervé Kempf, Pour sauver la planète, sortez du capitalisme, Le Seuil, 2009, ISBN : 978-2-7578-2475-7
(5) Voir aussi DEM00 : Marc Delepouve (coordination), Transition énergétique, changement de société, Éditions du Croquant, 2016, ISBN : 978-2-3651-2082-1
(6) Du moins pour le moment, mais des lois en préparation, ou déjà mises en œuvre dans certains pays, qui permettent, sur le modèle de la taxe carbone, d'acheter le droit à détruire la biodiversité, font craindre le pire.