L'ouvrage d'Atlan (1), est publié en 1999. Pourtant, comme nous allons le voir, le 6e PCRD (2002-2006) va maintenir en survie par le biais des financements, des réseaux d'excellence et des pressions sur les recherches nationales ou régionales, un cadre de pensée qui a atteint ses limites d'efficacité. Il a donc permis aux tenants d'un paradigme en coma dépassé de continuer à tenir le haut du pavé et à détourner vers la génomique une proportion indue des crédits de recherche. C'est de l'acharnement thérapeutique ! Deux tendances fortes marquent ces programmes : l'accent mis sur la génomique, avec surtout les techniques dites de « haut débit » qui permettent de rassembler des données en très grande quantité et à une très grande vitesse grâce à des appareillages de plus en plus sophistiqués regroupés dans des plate-formes technologiques, et la pénurie de moyens pour chercher ailleurs, par exemple pour développer les approches complexes de dynamiques non-linéaires. Et les choses n'ont pas changé de ce point de vue lors du programme suivant, le 7e PCRD 2007-2013 (2).
Pourtant, malgré le manque d'incitations, de telles recherches ont commencé à émerger et, pendant quelques années, elles ont commencé à éclore même en biologie (3). Puis très vite, venue d'outre-atlantique, s'installe une biologie des systèmes, mettant en œuvre des technologies de pointe dites à haut débit, qui exploitent au travers d'énormes banques de données, les résultats obtenus grâce aux connaissances des séquences d'ADN. Le complexe a cédé la place au compliqué, pour le plus grand bénéfice des fabricants d'appareillages de biologie moléculaire. Les tentatives de résistance et d'études de systèmes dynamiques complexes (mais qui peuvent être simples) s'épuisent les unes après les autres. Les laboratoires, les réseaux, les instituts de biologie intégrative, ou des systèmes intégrés qui ont fleuri ici et là, ont plus ou moins rapidement disparu ou ont été détournés, en France tout au moins, faute de soutien ou de crédits. La biologie est encore aujourd'hui très peu présente dans le Réseau national des systèmes complexes.
Tout ceci montre que la politique de la recherche européenne a bien eu des répercussions épistémologiques, au moins dans le domaine des sciences de la vie. Qu'en est-il des autres disciplines ?